Revue & Corrigée

Jouant d’une apparente hésitation dans la virtuosité de leur attaque, elles créent le suspense dès les premières phrases, testent leur vertige et notre hantise de la chute, et telles deux sœurs pressées d’enjamber un ravin, piétinent la maigre surface d’où elles s’élanceront à l’assaut du vide.

Il nous est de nouveau impossible de distinguer entre qui des deux praticiennes démêle l’écheveau enroulé autour du cadre pour en ciseler une dentelle d’acier tranchant, laquelle éveille cette réverbération naturelle qui semble tourner entre les pans de bois, quelle part encore prend chacune dans cette architecture industrielle érigée à force de pressions, de frappes assénées et de préparations immédiates qui forcent le métal et en arrachent les plus urgentes vibrations.

Joël Pagier, Revue & Corrigée n°118, décembre 2018

Revue de presse – album Iana – Revue & Corrigée 1/2

A peine paru déjà chroniqué tant la musique est belle, définitivement inclassable dans la pureté de son principe, foncièrement innovante sans pour autant prétendre à la modernité, aussi simple à l’oreille que délicate à l’interprétation. […]

Au-delà de l’inspiration classique ou populaire caractérisant ces œuvres la plus évidente qualité de cet enregistrement réside dans l’exigence à laquelle il convie notre écoute, l’oblige éventuellement, si nous souhaitons du moins continuer d’entendre ce qui se joue. Cette incitation de l’auditeur à devenir acteur de sa propre audition, dont la pièce de Nono s’avère sans doute le plus singulier exemple, transcende la musique écrite en musique vivante, au point que l’on comprend soudain pourquoi il fallait que des improvisateurs s’approprient ces pièces : eux seuls pouvaient exprimer une note ancestrale comme s’ils venaient de l’inventer, traquer la justesse et la véracité de l’instant jusque sous les pierres les plus improbables et nous inviter, pour les entendre, au fond des repaires les plus secrets. Eux seuls également pouvaient choisir la douceur d’un tel répertoire, eux qui savent la brutalité du choc culturel et son inséparable corollaire de solitude.

Joël Pagier, Revue & Corrigée, septembre 2018

Revue de presse – album Trois Oiseaux – Revue & Corrigée